Pank PdV #8 : Mon dojo, une dictature / My Dojo, a Dictatorship
Pank PdV #8 : Mon dojo, une dictature
Dans le monde des arts martiaux et des sports de combat, nous pénétrons dans un univers assez différent de notre quotidien. Si vous n’avez jamais mis les pieds dans ces lieux, il y règne une atmosphère (en dehors des odeurs) qui nous fait rapidement comprendre que ce ne sera pas forcément la rigolade. C’est d’autant plus vrai pour les petits néophytes qui souhaitent découvrir le monde du combat. Il y a bien sûr les écoles commerciales qui se préoccupent davantage des clients, puis il y a celles plus « traditionnelles » qui ne semblent pas particulièrement accueillantes.
Je fais plutôt partie de cette dernière tendance. Pour moi, les personnes importantes dans un dojo sont celles qui y sont présentes depuis un certain temps. Pourquoi ? Parce que je sais qu’un de mes gradés est un pratiquant qui a déjà investi des heures et des années de son temps et de son énergie pour venir régulièrement dans cette salle suivre mes enseignements. Ils méritent mon attention, ma confiance et mes efforts bien plus qu’un nouveau venu qui pourrait changer d’académie ou de sport dans un mois.
Peut-être ai-je lu trop de mangas ou pratiqué le karaté en excès, mais en fin de compte, c’est aux nouveaux élèves de faire des efforts en matière d’écoute, de présence et d’implication pour que je m’investisse en retour. Comme je le répète régulièrement, un dojo est une dictature, un lieu complètement hiérarchisé et absolument pas égalitaire ou équitable. Une dictature, avec un professeur tout-puissant (merde, ma thérapie n’a pas encore porté ses fruits), où les ceintures blanches n’ont aucun droit. Oui, aucun, ils doivent suivre ce que leur imposent leurs aînés sur le tatami, ils doivent s’écarter si un gradé est trop proche pendant les combats, accepter les décisions de ces derniers même s’ils ne sont pas d’accord.
Je sais que vu comme ça, ce n’est vraiment pas un lieu d’amour et de jiujitsu/luta pour tous. Si je me réfère aux critères de mon ami Gile de BJJ Eastern Europe, mes cours devraient être à fuir. Pourtant, j’ai des élèves formidables, des personnes sérieuses et impliquées qui savent qu’il n’y a pas de droit ou d’égalité, mais que tout le monde peut, avec du temps et du travail, progresser dans la hiérarchie. Tout le monde peut devenir ceinture bleue, violette, marron et noire. Cela impliquera des droits, mais aussi des responsabilités.
Un dojo n’est pas seulement un lieu pour améliorer nos capacités à se battre ou à affronter des conflits physiques, c’est aussi un moyen de se renforcer et de se préparer aux moments difficiles et douloureux de la vie. Le quotidien n’est pas juste, il est stressant, et nous subissons régulièrement des pressions. La salle de sport apporte la même chose et nous apprend qu’avec de la rigueur, de la constance et une capacité à encaisser, nous pouvons nous en sortir au mieux.
C’est également un lieu de sociabilisation et de connexion. Nous formons une équipe, et si certains élèves font des erreurs, c’est l’ensemble du groupe qui peut corriger ou en payer le prix. Il y a cette notion qui nous oblige à prendre soin des autres, dans tous les sens du terme. Cela implique que les autres se comportent correctement, qu’ils prennent 30 secondes pour boire, qu’ils arrivent à l’heure, qu’ils se taisent pendant les explications, qu’ils mettent suffisamment d’intensité dans les exercices. Il s’agit également d’être un bon partenaire (UKE), de permettre aux autres de progresser, de les protéger des blessures. Sans l’autre, même s’il ne s’agit que d’une ceinture blanche, il n’y aurait pas de progression ni d’avancée.
Nous devons prendre en considération ce partenaire, car si l’ego ou des émotions mal maîtrisées entraînent des blessures, c’est tout le groupe qui en subit les conséquences. Moins nous avons de coéquipiers, moins nous pouvons progresser.
Vivre dans cette dictature est certainement insupportable pour beaucoup, d’autant plus dans une société qui garantit la liberté d’expression à tous. Dans un dojo, la seule expression admise est « OSU », le reste appartient au retour à la vie normale. Une vie qui, jour après jour, nous semble de plus en plus confortable par rapport à ces quelques heures où un seul objectif prévaut : devenir meilleur dans notre quotidien, avec notre technique, notre corps et notre attitude.
Osu
Ne prenez ce qui est bon et juste pour vous.
Be one
Pank
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English Version
Martial Musings of a Hypnofighter #8: My Dojo, a Dictatorship
In the realm of martial arts and combat sports, we step into a world quite different from our everyday life. If you’ve never set foot in these places, there’s an atmosphere (apart from the smells) that quickly makes it clear that it won’t necessarily be all fun and games. This is especially true for newcomers who wish to explore the world of combat. There are, of course, commercial schools that focus more on their customers, and then there are the more « traditional » ones that might not seem particularly welcoming.
I tend to lean towards the latter. To me, the significant individuals in a dojo are those who have been there for some time. Why? Because I know that one of my advanced students is a practitioner who has invested hours and years of their time and energy to consistently come to this place and follow my teachings. They deserve my attention, trust, and efforts much more than a newcomer who might switch to a different academy or sport in a month.
Perhaps I’ve read too many manga or practiced karate excessively, but ultimately, it’s up to new students to put in the effort when it comes to listening, being present, and engaging so that I can invest in return. As I reiterate regularly, a dojo is a dictatorship – a completely hierarchical and far from equal or fair environment. A dictatorship, with an all-powerful teacher (damn, my therapy hasn’t borne fruit yet), where white belts have no rights. Yes, none, they must follow what their seniors on the mat dictate, they must move aside if an advanced student is too close during sparring, accept their decisions even if they disagree.
I know that seen this way, it’s really not a place of love and jiujitsu/luta for everyone. If I refer to my friend Gile’s criteria from BJJ Eastern Europe, my classes should be avoided. Yet, I have wonderful students, serious and dedicated individuals who understand that there’s no entitlement or equality, but that everyone can, with time and effort, progress in the hierarchy. Everyone can become a blue, purple, brown, and black belt. This will entail rights but also responsibilities.
A dojo is not just a place to enhance our fighting abilities or face physical conflicts; it’s also a means of building ourselves up and preparing for life’s tough and painful moments. Everyday life isn’t fair, it’s stressful, and we regularly encounter pressures. The gym provides the same and teaches us that with discipline, consistency, and the ability to endure, we can come out on top.
It’s also a place of socialization and connection. We form a team, and if some students make mistakes, the entire group may correct them or pay the price. There’s this notion that obligates us to care for others, in every sense of the term. This means that others behave properly, take 30 seconds to drink, arrive on time, stay quiet during explanations, put enough intensity into exercises. It’s also about being a good partner (UKE), allowing others to progress, protecting them from injuries. Without the other, even if it’s just a white belt, there would be no progress or advancement.
We need to consider this partner, because if ego or poorly managed emotions lead to injuries, the whole group bears the consequences. The fewer teammates we have, the less we can progress.
Living in this dictatorship is surely unbearable for many, especially in a society that guarantees freedom of expression for all. In a dojo, the only permitted expression is « OSU, » the rest belongs to the return to normal life. A life that, day by day, seems more comfortable compared to those few hours where a single goal prevails: to become better in our everyday lives, with our technique, our bodies, and our attitude.
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