Le jiu-jitsu a-t-il des vertus de développement personnel ? / Does Brazilian Jiu-Jitsu Have Personal Development Virtues?

 Le jiu-jitsu a-t-il des vertus de développement personnel ?



Je suis stupéfait de constater que le jiu-jitsu brésilien semble si peu apte à enseigner des valeurs morales et martiales. Nous sommes en période de confinement, que cela soit justifié ou non, que cela nous plaise ou non, c'est un fait : nous devons rester chez nous autant que possible.

Cela ne requiert pas non plus une volonté de fer, forgée par des années d'entraînement, que de rester confiné dans l'espace que nous avons aménagé pour vivre, en dehors du travail. Bien sûr, les conditions ne sont pas optimales, avec la proximité, les changements d'habitudes, parfois des logements trop petits. Cependant, nous ne sommes pas en train de vivre sous les bombardements, armés jusqu'aux dents, en proie à la famine, ou en voyant des gens s'effondrer dans les rues suite à des tirs de snipers ou de drones.

Les pratiquants d'arts martiaux, et beaucoup de ceux qui s'adonnent à l'art souple, se considèrent comme des "dur à cuire" cherchant un style "efficace". Ils évoluent dans un environnement tendu sur les tatamis, avec des infections cutanées et d'autres problèmes, des adversaires leur infligeant des clés et des étranglements, comme si chaque entraînement était un champ de bataille... Ils adoptent une attitude "costaud", affirmant qu'ils ne sont pas des "fragiles".

Cependant, ces mêmes individus ne sont pas capables de s'abstenir de s'entraîner, voire simplement de ne pas rouler avec d'autres. Ils semblent dépendants, mentalement faibles, nécessitant leur "dose". "Nous sommes accros, que veux-tu, Pank..." C'est curieux, car ces mêmes accros s'arrêtent souvent au grade de ceinture bleue et s'entraînent trois fois par semaine, trouvant même le moyen d'éviter l'échauffement. Nous ne vivons pas dans un monde post-apocalyptique, où nous sommes réduits à vivre parmi des ruines et à attendre que les bombardements cessent. Nous pouvons courir, nous pouvons bouger chez nous de différentes manières ; il existe de nombreuses solutions pour rester actifs.

Qu'est-ce que les pratiquants de jiu-jitsu ne comprennent pas ? Une règle ? Qu'elle soit justifiée ou non, une règle s'applique à tous. Que nous soyons d'accord ou non avec le confinement n'est pas pertinent, tout comme lorsque l'on nous dit qu'il est interdit de faire une heel hook, nous nous abstenons, sinon nous risquons une sanction ou même une élimination du tournoi. Nous sommes tous capables de suivre des règles, même si elles sont contraignantes. Nous le faisons en compétition, et nous le faisons même dans notre académie, en respectant l'étiquette de nos professeurs, des plus gradés, et les règles du dojo. Alors pourquoi n'êtes-vous pas capables de vous retenir de rouler avec d'autres ?

Si vous avez trop d'énergie, si vous en avez marre de tourner en rond, si vous ne supportez plus de ne pas bouger, c'est bien. Aidez les autres, soutenez les personnes en difficulté. Il existe de nombreuses opportunités de bénévolat avec des journées de travail de six heures, cinq jours par semaine, que vous pouvez trouver ici : [lien1] ou là : [lien2].

J'ai du mal avec l'esprit du jiu-jitsu, trop de discours, un pseudo-lifestyle qui donne l'impression d'une solidarité (même si l'entraide est parfois présente), du respect et potentiellement de l'amélioration de soi. Je n'y vois qu'un sport, dans lequel nous, éducateurs (les professeurs), n'avons pas réussi à transmettre les principes des arts martiaux. Autant que j'étais saturé de l'orientalisme et parfois même de l'ésotérisme des systèmes asiatiques, autant nos senseis tentaient de nous offrir une voie, comme l'avait conçue Jigoro Kano, une voie de progression personnelle et, par conséquent, pour la société. Beaucoup d'arts martiaux japonais avaient un objectif qui allait au-delà de la simple confrontation (même ludique comme le judo ou le jiu-jitsu) : nous aider à devenir plus forts, plus souples, plus disciplinés à la fois sur le plan physique et mental.

Il y avait un esprit de communauté (certes, parfois un peu extrémiste ou nationaliste). Si un budoka progressait, la nation pouvait compter sur des individus de valeur. So Doshin (le fondateur du Shorinji Kempo) allait même chercher des jeunes en difficulté dans les quartiers pauvres après la guerre pour les aider à se restructurer, tant sur le plan physique que moral, et à devenir des citoyens utiles pour le pays. En revanche, d'après toutes les vidéos, les messages, les captures d'écran que l'on m'envoie, nous, dans le jiu-jitsu, n'avons apparemment pas réussi à atteindre cet objectif. Il semble que de nombreux membres de notre communauté soient tellement fragiles mentalement qu'ils ne peuvent pas tenir deux mois et demi sans aller rouler. Je le répète, ce n'est pas comme si nous ne pouvions pas faire d'autres sports. Apparemment, en termes de flexibilité mentale, il y a aussi un problème.

Nous n'avons pas réussi à offrir un jiu-jitsu comme un chemin vers l'amélioration de soi, pour dépasser nos faiblesses, pour renforcer nos qualités. Je m'inclus dans cette critique, étant moi-même un acteur mineur de cette communauté, ne serait-ce que par l'intermédiaire de mon académie. Peut-être avons-nous trop axé le jiu-jitsu comme une récompense à la recherche de reconnaissance grâce aux compétitions. Nous avons fait des champions de tatami, des acteurs éphémères qui nourrissent leur ego, plutôt que des combattants du quotidien qui tentent de développer des vertus telles que la patience, le dévouement et le don de soi. Hier, j'ai lu un article affirmant que tout le monde veut devenir champion du monde, mais que personne n'est prêt à faire les sacrifices nécessaires. Étrangement, il y a moins de pratiquants de jiu-jitsu prêts à devenir simplement de meilleures personnes, sans glamour, sans médailles, tout en consentant aux sacrifices que cela implique...

Soyez un.

Pank

Does Brazilian Jiu-Jitsu Have Personal Development Virtues?

I am amazed to see that Brazilian Jiu-Jitsu appears to be so inadequate at teaching moral and martial values. We are in lockdown, whether it is justified or not, whether we like it or not, it is a fact - we must stay home as much as possible.

It does not require an iron will, honed through years of training, to stay confined to the living space we have arranged to spend time in outside of work. Granted, conditions are not ideal, with proximity, changes in routines, and sometimes cramped living spaces. However, we are not living under bombardment, armed to the teeth, experiencing famine, or witnessing people collapsing in the streets due to sniper or drone attacks.

Martial arts practitioners, especially those in the realm of Brazilian Jiu-Jitsu, often consider themselves "tough guys" seeking an "effective" style. They live in a tense environment on the mats, dealing with skin infections and other issues, facing opponents applying joint locks and chokes, as if each training session were a battlefield. They adopt a "tough" attitude, asserting that they are not "fragile."

Yet, these very individuals are unable to refrain from training, or even just from rolling with others. They seem addicted, mentally weak, needing their "fix." "We're addicts, what can you do, Pank..." It's amusing because these same addicts often stop at the blue belt level and train three times a week, finding ways to avoid warming up. We are not living in a post-apocalyptic world, where we are reduced to living amidst ruins and waiting for the airstrikes to stop. We can run, we can move in various ways at home; there are numerous solutions to stay active.

What do Brazilian Jiu-Jitsu practitioners fail to understand? A rule? Whether it is justified or not, a rule applies to everyone. Whether we agree or not with the lockdown is irrelevant, just as when we are told not to perform a heel hook, we refrain, or else risk punishment or even disqualification from the tournament. We are all capable of following rules, even if they are restrictive. We do it in competition, and we do it in our academies by respecting the etiquette of our instructors, the higher-ranked students, and the dojo rules. So why are you incapable of refraining from rolling with others?

If you have excess energy, if you are tired of going in circles, if you can't stand being still, that's fine. Help others, support people in need. There are many volunteer opportunities with six-hour workdays, five days a week, which you can find here: [link1] or here: [link2].

I struggle with the spirit of Brazilian Jiu-Jitsu, too much talk, a pseudo-lifestyle that gives the impression of solidarity (even though mutual aid is still present), respect, and potentially self-improvement. I see it as just a sport, in which we, the educators (the instructors), have failed to convey the principles of martial arts. As much as I grew tired of the orientalism and sometimes even the esotericism of Asian systems, our senseis tried to offer us a path, as conceived by Jigoro Kano, a path of personal progress and, consequently, societal improvement. Many Japanese martial arts had a goal that went beyond mere combat (even if it was playful, like judo or jiu-jitsu): to help us become stronger, more flexible, more disciplined, both physically and mentally.

There was a sense of community (albeit sometimes slightly extremist or nationalistic). If a budoka progressed, the nation could count on individuals of value. So Doshin (the founder of Shorinji Kempo) even sought out troubled young men in poor neighborhoods after the war to help them restructure themselves, both physically and morally, and become useful citizens for the country. However, based on all the videos, messages, and screenshots I receive, we in Brazilian Jiu-Jitsu have apparently not achieved this. It seems that many members of our community are so mentally fragile that they cannot abstain from rolling for two and a half months. I reiterate, it's not as if we cannot engage in other sports. Apparently, there is also a mental flexibility issue.

We have not succeeded in offering Brazilian Jiu-Jitsu as a path to self-improvement, to overcome our weaknesses, to develop our qualities. I include myself in this critique, as I am a minor player in this community, if only through my academy. Perhaps we have focused too much on Brazilian Jiu-Jitsu as a reward for the pursuit of recognition through competitions. We have created champions of the mat, ephemeral actors who feed their egos, rather than everyday fighters trying to develop virtues such as patience, dedication, and selflessness. Yesterday, I read an article stating that everyone wants to become a world champion, but no one is willing to make the necessary sacrifices. Strangely, there are fewer Brazilian Jiu-Jitsu practitioners willing to become better individuals, without the glamour, without medals, but still willing to make all the sacrifices it requires...

Be one.

Pank

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